Certification des métiers, validation des compétences ? : Afin que l’agroalimentaire prenne son envol au Sénégal

18 octobre 2010 – La certification des métiers et la validation des compétences dans l’agroalimentaire donneraient au secteur son envol. La plate-forme de l’agroalimentaire du Sénégal qui regroupe plusieurs associations de transformation de produits locaux, a lancé le plaidoyer ce week-end à Dakar.

Publié le 18 octobre 2010

La valorisation des métiers de l’agroalimentaire est à l’état embryonnaire. Le secteur est aujourd’hui grouillant et difficile de dire qui est transformateur et qui ne l’est pas. Avec ou sans qualification, tout le monde s’y est mis, jetant le discrédit sur les professionnels et la filière. Cela ne peut plus continuer. Voilà pourquoi la plate-forme de l’agroalimentaire du Sénégal, composée de plusieurs associations, a organisé, en partenariat avec Enda Graf et la Coopération espagnole, une journée de lancement de campagne de plaidoyer sur la certification des compétences et la validation des métiers. Un diagnostic du secteur révèle que les transformateurs et transformatrices avec plusieurs années de métier n’ont pas une expertise reconnue et validée dans le secteur de l’agroalimentaire. A cela, s’ajoute l’absence d’une charte sur les produits transformés pour valider les expériences des acteurs. ?Le problème du respect des normes de qualité des produits offerts sur le marché pose donc une question de sécurité et d’hygiène alimentaire’, regrettent les différents acteurs.

Pourtant, le secteur offre une mosaïque d’unités, mais il fait face à une insuffisance de structures d’encadrement, de suivi et d’accompagnement des transformateurs et transformatrices, y compris par les transformateurs et transformatrices eux-mêmes. Mécanismes de contrôle insuffisants, les corps de métiers existants aujourd’hui ne prennent pas en compte certains métiers et expériences professionnelles dans le secteur. Conséquence : Des contraintes majeures dans l’agroalimentaire, notamment l’anarchie dans le secteur, l’incertitude sur la qualité et la traçabilité des produits transformés livrés à la consommation, le manque de compétitivité des unités de transformation, entre autres.

Malgré toutes ces difficultés, les organisations professionnelles de la transformation des céréales locales, membres de la plate-forme, font ?un chiffre d’affaires de 1,3 milliard de francs Cfa par an, celles de la filière lait arrivent à faire des investissements de l’ordre d’un milliard de francs Cfa dans les entreprises artisanales de transformation du lait local, pour les fruits et légumes, les chiffres d’affaire réalisés oscillent entre 24 millions 480 mille et 61 millions 200 mille FCFA pour les jus et entre 38 millions 400 mille et 144 millions de francs CFA pour les sirops. Au niveau de la restauration de rue, les chiffres d’affaire réalisés sont évalués à plus de 315 milliards de francs Cfa’, confie la coordonnatrice de la plate-forme, Fatou Ndoye.

Selon elle, le potentiel de création d’emplois cumulé avoisine neuf mille emplois connus pour les seules organisations de la plate-forme. D’autres estimations assez sérieuses font part de près vingt-sept mille emplois permanents et non permanents en ce sens que les statistiques disponibles sont les seules dont disposent les organisations professionnelles quoique n’étant pas explicites sur les différentes catégories professionnelles.

Les organisations professionnelles qui composent la plate-forme agroalimentaire représentent à peu près vingt-cinq mille micro et petites entreprises agro alimentaires. Au sein de la plate-forme, au moins cinq filières sont représentées avec comme dénominateur commun d’être toutes dans le processus qui va de la matière première à l’assiette (de la fourche à la fourchette). Les filières ciblées sont : Céréales locales, Lait, Produits halieutiques, Fruits et légumes, Restauration de rue. Concrètement la plate-forme est composée d’organisations professionnelles ou réseau d’organisations ou de petites unités.

Le rôle assigné à la plate-forme, selon la présidente Nafi Diagne, est ?d’une part de favoriser les conditions d’un plaidoyer efficace des organisations professionnelles sur toutes les questions qui touchent aux activités de ses membres, et d’autre part de constituer un pôle de propositions à partir des transversalités porteuses de changements. Ce rôle est ainsi décliné à partir de la vision et de la mission que la plate-forme se donne’.

Un savoir-faire local au service de la souveraineté alimentaire

La plate-forme opte pour un savoir-faire local au service de la souveraineté alimentaire. Sa mission est de promouvoir une consommation alimentaire de produits de qualité et compétitifs, à partir du savoir-faire et des compétences locales valorisées. Un plaidoyer bien mené apporterait un plus pour booster la transformation. Les métiers de la transformation contribuent ainsi aux budgets des collectivités locales, de l’Etat et des ménages, en réduisant le chômage. Dans plusieurs secteurs, ce plaidoyer se justifie pleinement. Sur le plan économique, la certification des métiers et la validation des compétences se justifient pour plusieurs raisons : elles créent de nouveaux contribuables et constituent une source de perception d’impôts, contribuent au relèvement du chiffre d’affaires avec une productivité plus forte, ainsi qu’à une indexation des salaires des travailleurs du secteur aux normes.

Sur le plan social, des emplois nouveaux reconnus et respectant l’hygiène, la sécurité et la sûreté alimentaire avec un personnel compétent permettent aussi de réaliser une valorisation du savoir-faire local et des ressources humaines. Dans le domaine politique, les effets sont importants, note la présidente Nafi Diagne, avec une résorption du chômage, la réduction de la pauvreté et un renforcement des compétences.

La certification des formations délivrées par les structures d’enseignement mettrait en cohérence les différents profils avec une association et une valorisation de la théorie et de la pratique. Les personnes compétentes expérimentées pourraient constituer des personnes ressources pour augmenter l’offre de formation qualifiante.

Amadou NDIAYE, Walfadjiri