« Il y a un dérèglement alimentaire dans les villes africaines »

Un atelier sur la consommation alimentaire dans les villes africaines s’est tenu du 4 au 6 mai 2015 à Dakar, organisé par l’Initiative Prospective Agricole et Rurale (IPAR), en partenariat avec l’Institut international pour l’environnement et le développement (IIED). A cette occasion, Nicolas Bricas, Chercheur au CIRAD s’est exprimé sur les pratiques alimentaires et leurs évolutions récentes dans les villes d’Afrique de l’Ouest.

Publié le 7 mai 2015

L’urbanisation et les transformations rurales ont beaucoup influé sur la consommation alimentaire dans les grandes villes Africaines. Ce qui a beaucoup influé sur les habitudes alimentaires des populations. Nicolas Bricas, Chercheur au CIRAD, estime qu’il y a un problème de dérèglement alimentaire dans les villes d’Afrique de l’Ouest où les gens consomment trop de sucres et trop de matières grasses. Il s’exprimait hier, lundi 4 mai, à Dakar, à l’occasion d’un atelier sur la consommation alimentaire organisé par l’Initiative Prospective Agricole et Rurale (IPAR), en partenariat avec l’Institut international pour l’environnement et le développement (IIED).

Le chercheur Nicolas Bricas, dans sa présentation faite hier, lundi 4 mai, à l’occasion de l’ouverture de l’atelier sur la consommation alimentaire, l’urbanisation et les transformations rurales en Afrique de l’Ouest, a signalé qu’il y a un dérèglement du régime alimentaire dans les villes Africaines. ? Aujourd’hui le problème de la malnutrition est beaucoup moins le problème de calories, il est devenu beaucoup plus un problème de carence en micronutriments, mais aussi un problème dans les villes du dérèglement du régime alimentaire avec maintenant des régimes devenus trop gras, trop sucrés, trop caloriques ?, a-t-il laissé entendre dans sa présentation.

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Par conséquent, ? les micronutriments comme la vitamine A, le fer, le zinc, l’iode sont toujours en déficit ?, alerte-t-il. Estimant que ? la problématique alimentaire a complètement changé depuis les années 80, le chercheur français, a signalé que ?le problème n’est plus tellement de savoir est-ce qu’on produit assez en calories, mais c’est plutôt est-ce qu’on produit maintenant de façon à satisfaire un régime diversifié ?.
Selon toujours Nicolas Bricas, ? les pays Africains sont capables aujourd’hui de nourrir majoritairement leurs populations à partir de produits locaux même s’il y a un problème pour les céréales ?.

Très en verve sur les questions alimentaires pour avoir pratiqué le continent depuis plusieurs décennies déjà, il établit un tableau de valeurs qui diversifie les différentes consommations en milieu rural comme en ville. ? En milieu rural, les dépenses pour la consommation de produits amylacés s’élèvent à 40 %, les produits animaux 20 % et les autres produits c’est 40 %. Dans les grandes villes, la structure est différente. C’est grosso modo, 30 % de dépenses pour les produits amylacés, 30 % pour les produits animaux, 30 % pour les autres produits. Cela veut dire que la question céréalière diminue en ville et que les 2/3 du marché alimentaire urbain sont composés de produits animaux ?, nous renseigne-t-il.

Pour dépendre moins des importations

Dans ses analyses, Nicolas Bricas nous fait découvrir un tableau dans lequel il redonne espoir au continent qui peut par la diversification parvenir à dépendre moins des importations. ? Quand on fait des analyses un peu plus poussées, on découvre que plus vous avez une diversification de vos produits de base, plus vous pouvez alterner le riz avec du maïs, avec des pommes de terre, avec de l’igname, avec du manioc ou avec du plantain, moins vous dépendrez des importations ?, révèle-t-il. ? Si vous prenez un hectare et vous plantez des céréales et que vous prenez un autre hectare dans lequel vous plantez du manioc ou de l’igname. Ce ne sera pas intéressant de comparer votre rendement en kilos, mais il faut comparer en production énergétique. Combien il y a de calories dans cet hectare de céréales et combien il y en a dans cet hectare de manioc ou d’igname.

Dans l’hectare d’igname, il y a trois fois plus de calories que dans l’hectare de céréales ?, laisse-t-il entendre en guise d’exemple. ? C’est comme ça que le Nigéria, le Bénin, le Togo, la Côte d’Ivoire ont fait exploser leur production calorique parce qu’ils ont fait la révolution du manioc ?, soutient-il. Même si à son avis ? ce n’est pas facile de le faire dans le Sahel parce que le climat n’est pas favorable ?, malgré une remontée de ces racines et tubercules, et des variétés qui s’adaptent maintenant aux zones plus sèches.

Source : Sud Quotidien