Huile d’arachide artisanale très en vogue dans le bassin arachidier

La trituration artisanale de la graine d’arachide est devenue un véritable business dans le bassin arachidier, principale zone de production de l’arachide au Sénégal. L’activité est en train de révolutionner le vécu quotidien des groupements de femmes avec des parts de marché annuelles estimées à plus de 675 000 litres d’huile brute. Touba, principal pôle de consommation du « Seggal » produit a elle seule environ 200 litres au quotidien.

Publié le 28 juin 2016

De Mbirkilane dans le Ndoucoumane à Diossong, en pays sérère, en passant par Sibassor au cœur du Saloum ou encore à Touba, dans le Baol, la trituration de la graine d’arachide est devenue une activité qui fédère les énergies des groupements d’intérêt économique (Gie) des femmes du bassin arachidier. Ici, l’introduction de la table de traitement, une nouvelle technologie mise au point par l’Institut de technologie alimentaire (Ita) et disséminée à travers le Sénégal par l’Agence nationale de conseil agricole et rural (Ancar) dans le cadre du projet de diffusion à grande échelle des bonnes pratiques de traitement d’huile artisanale d’arachide, est en train de faire des émules. En effet, grâce à un financement du Fonds national de recherches agricoles et agroalimentaires (Fnraa) effectué dans le cadre de la phase 2 du Programme de productivité agricole en Afrique de l’Ouest (Ppaao), les femmes du monde rural sénégalais sont en train d’adopter cette nouvelle technologie introduite pour répondre à deux soucis majeurs : l’élimination de l’aflatoxine, un champignon contenu dans l’arachide et qui est à l’origine de certaines pathologies chez l’homme, et la création de revenus en vue d’améliorer le quotidien des ruraux.

Aujourd’hui, grâce à cette technologie, la filière arachidière connaît des mutations profondes. Pour preuve, le tonnage de plus en plus important de l’autoconsommation des quantités de graines produites au niveau du Sénégal. En 2016, environ 350 000 tonnes de graines ont été autoconsommées pour une production nationale de 1,05 million de tonnes d’arachide. Même si on éprouve encore des difficultés à quantifier avec exactitude le taux qui reviendrait à la trituration artisanale des graines au Sénégal, les techniciens sont unanimes à soutenir qu’il constitue environ le tiers des quantités de graines réservées à l’autoconsommation au Sénégal. Ce qui équivaut à plus de 24 000 tonnes d’arachide cette année au moment où les huiliers du Sénégal n’ont pu collecter que 39 275tonnes.

Amélioration des revenus en milieu rural

Les propos tenus par la présidente du groupement des femmes de Diossong, Atta Sène,  traduisent à suffisance l’émotion qui étreint les populations de ces zones rurales en évoquant la fabrication d’huile artisanale en milieu rural. En effet, le mauvais souvenir qu’elles en gardent avec le fléau du cancer et des nombreuses pertes en vie humaine à cause de la consommation du « Seggal » a cédé aujourd’hui la place à la joie et à l’allégresse grâce à la table de traitement utilisée désormais par les femmes pour produire de l’huile brute consommable sans danger. « Si nos parents pouvaient se remuer dans leurs tombes, ils seraient, aujourd’hui, heureux de relater tout le chemin parcouru pour arriver à cette révolution qui a fini de semer la prospérité dans nos villages », a déclaré Atta Sène, à l’occasion d’une visite de terrain conduite par la directrice générale de l’Ancar, Mariama Dramé.

La production de l’huile « Seggal » a été une source de progrès pour nous et de sécurité alimentaire en même temps, a ajouté la présidente du Gie Natangué de Diossong. « Ce projet vient non seulement répondre à une question de santé publique mais contribue aussi à l’amélioration des revenus des femmes en milieu rural », a souligné, dans la même lancée, Aïda Codou Faye du Gie de Mbirkilane.

Plus de 200 litres produits par jour à Touba

Touba est devenue le bastion de la production de l’huile « Seggal » au Sénégal. Sokhna Mbacké, responsable d’un Gie promoteur de cette activité dans la région de Diourbel,  a indiqué que la filière est devenue une véritable source de revenus. Mieux, il estime qu’elle peut devenir une alternative au déficit de production des huiliers en leur fournissant de l’huile brute à raffiner. « A Touba seulement, notre unité arrive à produire plus de 200 litres d’huile ‘’Seggal’’ par jour », a souligné la dame. On dénombre, aujourd’hui, dans le bassin arachidier, environ 200 groupements de femmes qui s’activent dans cette filière. Ce qui fait dire à la directrice de l’Ancar que la production d’huile artisanale est devenue une activité porteuse en milieu rural.

Un produit très prisé par les consommateurs

En trois mois d’activité (janvier à mars), les différents groupements producteurs d’huile « Seggal) arrivent à mettre sur le marché local au moins 675 000 litres d’huile artisanale dans le bassin arachidier. Une production qui, comme l’a souligné Nogoye Diop de Sibassor, ne souffre d’aucun problème de débouché. « Nos clients sont en majorité les fonctionnaires moyens et les revendeurs du marché. L’huile ‘’Seggal’’ se trouve même dans certains surfaces commerciales à Dakar », a-t-elle souligné. Pour vulgariser davantage cette technologie et aider les productrices à répondre aux normes requises, l’Etat du Sénégal et la Banque mondiale ont mis la main à la patte en octroyant des financements à hauteur de 800 000 FCfa par unité de production.  70 d’entres elles en ont déjà bénéficié dans le bassin arachidier. L’Ancar et l’Ita sont en train de conjuguer leurs efforts pour les amener à mettre en place une coopérative de producteurs d’huile « Seggal » afin d’augmenter les parts de marché et la valeur marchande de ce produit écoulé en ce moment à 1000 FCfa le litre au Sénégal.

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